La légendaire 20 H.P, connue simplement sous le nom de ‘Twenty’, est lancée le 6 octobre 1922. Conçue par Henry Royce, elle figure parmi les modèles les plus importants jamais produits par la marque. Sa technologie, très avancée pour l’époque, a servi de modèle mécanique pour plusieurs générations de voitures Rolls-Royce qui ont suivi.
Plus petite, plus légère et moins complexe que ses prédécesseurs, elle est également la première Rolls-Royce spécifiquement destinée à être conduite par son propriétaire, plutôt qu’à être utilisée avec un chauffeur, reflétant le monde changé dans lequel Rolls-Royce se trouve après 1918. Plus d’un siècle plus tard, son influence est encore visible dans l’ingénierie et la conception automobile contemporaines, y compris les modèles qui sont utilisés aujourd’hui à Goodwood – une voiture remarquable avec un héritage extraordinaire.
Un monde changé
Avant même la signature de l’Armistice en 1918, Henry Royce se prépare à un monde différent d’après-guerre. Il pense que compte tenu des difficultés probables de recrutement, et du coût d’un mécanicien ou d’un chauffeur comme avant la première guerre mondiale, certains clients ne pourront plus ou ne voudront plus utiliser le modèle pré-1914 le plus populaire de la marque, la 40/50 H.P. “Silver Ghost”. Il doit donc créer une voiture plus simple à entretenir que le propriétaire peut lui-même conduire. En même temps, Royce sait que ces clients exigeants n’accepteront rien de moins que les standards d’excellence de Rolls-Royce auxquels ils sont habitués.
La “Twenty”
Le 6 octobre 1922, Rolls-Royce dévoile sa nouvelle voiture d’une puissance moindre, la 20 H.P, la première Rolls-Royce jamais conçue expressément pour être conduite par son propriétaire plutôt que par un chauffeur. Il est évident que la “Twenty”, comme elle est rapidement nommée, représente un grand bond technologique en avant. Son moteur six cylindres en ligne de 3,1 litres avait moins de la moitié de la taille de l’unité de 7,5 litres de la Silver Ghost : cependant, le nouveau modèle pèse environ 30 % de moins. Cela signifie que l’écart de performance entre eux est bien moindre que les chiffres bruts peuvent le suggérer. En effet, avec ses commandes légères et ses systèmes de direction, de freinage et de suspension plus avancés, la “Twenty” fait paraître la Silver Ghost plutôt dépassée, bien que le modèle plus grand reste significativement en avance sur ses concurrents directs.
La “Twenty” devient rapidement une favorite tant des propriétaires de Rolls-Royce établis que des nouveaux clients pour lesquels, comme Royce l’a prédit, le prix d’achat et les coûts de fonctionnement en cours sont des considérations plus importantes qu’elles ne l’ont été quelques années plus tôt.
Dans les articles de presse automobile de l’époque, un propriétaire satisfait fait des éloges de cette voiture en la décrivant “un charmant morceau de mécanisme” tandis qu’un autre déclare, “Je n’ai jamais manipulé quelque chose d’aussi doux”. Une publicité de l’entreprise affirme que : “Tout ce qu’un automobiliste peut vouloir… une conduite avec un haut degré de raffinement et sa simplicité de construction ravira le conducteur”. Après avoir pris livraison de sa voiture, un client content écrit à l’entreprise depuis son domicile en France déclarant : “J’ai conduit ma 20 H.P. ici depuis Liverpool et je suis très satisfait du fonctionnement du moteur, n’ayant pas eu à changer de vitesse entre Liverpool et Versailles”.
Questions de poids
Comme tous les modèles Rolls-Royce de l’époque, la “Twenty” est fabriquée sous forme de « châssis roulant », sur lequel les propriétaires commandent une carrosserie sur mesure auprès d’un carrossier indépendant. Royce a toujours envisagé cette voiture comme étant principalement destinée à être conduite par son propriétaire. Il espère donc que les carrossiers et les clients adoptent cette idée dans leurs créations, en visant des designs à la fois élancés et légers autant que possible.
Pourtant, il est incapable de modifier les habitudes ancrées de certains clients. Beaucoup d’entre eux persistent à choisir des carrosseries solides selon leur style préféré, malgré leur poids supplémentaire et la résistance accrue au vent qui en découle. Cela contrarie Royce, car ces carrosseries imposantes compromettent inévitablement les performances.
Toujours pragmatique, Royce sait qu’il n’y a qu’une manière d’améliorer le rapport poids/performance. En 1929, la ‘Twenty’ est remplacée par la 20/25 H.P., dotée d’un moteur de plus grande capacité, suivie en 1935 par la 25/30 H.P. avec un moteur de 4,25 litres. L’ère des voitures de faible puissance prend fin avec la Wraith de 1938. Ces versions ultérieures, développées à partir de la « Twenty », ont encore renforcé sa réputation.
Un influence durable
La « Twenty » marque profondément la marque Rolls-Royce même après la fin de sa production en 1929, après avoir vu la construction de pas moins de 2 940 exemplaires. Son moteur à six cylindres en ligne, avec une culasse détachable et des soupapes en tête, a notamment servi de référence pour les moteurs Rolls-Royce pendant de nombreuses années. Ce modèle a influencé directement les conceptions ultérieures, jusqu’aux modèles Silver Cloud (1955-1959), où leur lien hérité est clairement visible sous le capot, malgré de nombreuses améliorations internes apportées au fil du temps. De même, lorsque la vénérable Silver Ghost cède la place à la nouvelle Phantom en 1925, son moteur hérite également des traits essentiels de la « Twenty ».